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« Mon chat et moi, la grande aventure de Rroû » : un film délicat et initiatique pour petits et grands

Clémence a 10 ans. Elle découvre par hasard un chaton dans le grenier de son immeuble parisien. Elle le prénomme Rroû en raison du bruit qu’il fait lorsqu’il ronronne. D’abord sauvage, elle l’apprivoise peu à peu avec l’aide de ses parents. Un jour, ils l’emmènent dans leur maison des Vosges. Près de cette forêt et au contact d’autres animaux sauvages, la personnalité de Rroû commence à changer…

 

Mon chat et moi, la grande aventure de Rroû de Guillaume Maidatchevsky

Avec Capucine Sainson-Fabresse et Corinne Masiero

Sortie en France et en Suisse romande : 5 avril 2023

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L’adaptation d’un classique

L’histoire du film est directement inspirée d’un livre de Maurice Genevoix, « Rroû » écrit en 1931. Celui-ci est un écrivain réputé pour ses « livres de nature ». Il obtient le prix Goncourt en 1925 pour « Raboliot » et est élu à l’Académie française en 1946. Maurice Genevoix se serait inspiré d’une histoire réelle, celle d’une domestique venue avec son chat à la campagne qui, au contact d’une nature ouverte et riante, décide de disparaître… On ne peut s’empêcher de penser à « l’appel de la forêt » et au chien Buck qui retrouve peu à peu ses instincts sauvages lorsqu’il fréquente la forêt nord-canadienne.

L’appel de la forêt

Le moment n’est pas facile pour Clémence : comme ses parents se disputent régulièrement, elle trouve du réconfort dans son imaginaire et auprès de ce petit chat qu’elle a trouvé par hasard. Comme le récit de Maurice Genevoix est écrit à la 3èmepersonne, le réalisateur Guillaume Maidatchevsky nous raconte l’histoire à hauteur de chat et c’est un des attraits particuliers de ce joli film. Régulièrement, la caméra nous le rappelle avec les gros plans sur les grands yeux de Rroû à la fois scrutateurs, interrogateurs, vifs, curieux. Nous le suivons dès ses premiers pas dans le grenier, puis au fur et à mesure de ses explorations. Ainsi, la découverte de la forêt et de ses mystères se fait à travers lui avec beaucoup de poésie. La lumière et le cadrage sont soignés, l’apparition du lynx est majestueuse. La subite fascination de Rroû pour ce Seigneur des bois, plus grand félin d’Europe, est très bien traduite… et nous la partageons pleinement ! Le réalisateur Guillaume Maidatchevsky nous offre ainsi une immersion particulière dans la forêt, lui donnant un air mystérieux, voire dangereux. Les bois n’étaient-ils pas craints par les villageois au Moyen-âge qui y projetaient leurs fantasmes ? La lisière de la forêt marquait alors la frontière entre un monde civilisé et rassurant et un monde sauvage, méconnu où s’installaient des marginaux ou des hommes aux professions peu reconnues comme les charbonniers. On comprend peu à peu la fascination que cette forêt exerce sur Rroû et son envie d’y retourner malgré le froid et les dangers.

L’autre intérêt de ce film est de remettre les animaux dans leur contexte de vie, rappeler qu’avant d’être des animaux de salon, ce sont des bêtes sauvages qui ont besoin de liberté et d’espace… même si la vie leur sera plus difficile. Habilement, le réalisateur utilise le personnage de Madeleine, (une « sorcière » aux yeux de Clémence), comme porte-parole. Cette femme artiste qui vit en solitaire dans sa maison au-milieu des bois en compagnie de son chien Rambo est le miroir contraire de Clémence et de ses parents. Son respect pour les animaux se traduit par une autre attention, comme celui de respecter leur habitat naturel ou de refuser qu’ils souffrent inutilement. Très bien interprétée par Corinne Masiero, Madeleine a un langage brutal mais vrai non seulement sur la faune mais aussi sur les relations entre les hommes. Elle encourage Clémence à lâcher prise en respectant le désir naturel de Rroû de reprendre sa liberté. Ainsi Clémence évolue, quitte aussi son monde d’enfant et devient douloureusement plus mature. Cette histoire est celle d’un double apprentissage.

Un beau film de vacances pour petits et grands.

 

Virginie Hours, reporter pour ColorMyGeneva – tous droits réservés

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