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« Mon chat et moi, la grande aventure de Rroù » au cinéma : interview du réalisateur Guillaume Maidatchevsky

Comment avez-vous découvert le livre de Maurice genevois ?

C’est un des co-producteurs du film Stéphane Millière qui avait ce livre sur sa table de chevet lorsqu’il était jeune. “Rroû”, l’univers du livre, lui ont donné l’envie de créer sa société de production. Lorsqu’il m’a donc proposé de l’adapter au cinéma, j’ai ressenti une grande responsabilité et en même temps une fierté.

 

Pourquoi et comment l’adapter à notre époque ? Quels sont les thèmes intemporels ?

Le livre a été écrit en 1931. Les comportements ont changé depuis. Je voulais faire un film qui parle à tous, aussi bien aux enfants qu’aux parents d’aujourd’hui tout en conservant les valeurs portées par le livre, des valeurs de respect, de liberté. Ces thèmes sont effectivement intemporels, universels.

Il y a également une vraie vision de la nature, non édulcorée.  La nature peut être belle mais également cruelle parfois. Je n’ai aucune attache dans les Vosges mais j’ai découvert que ces forêts sont magiques.

 

Le chat est réputé être un animal indépendant… Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour filmer le chat au plus près ?

Effectivement le chat est un animal solitaire, indépendant. Pour moi, il n’a également rien de domestique. C’est un animal sauvage. Filmer un félin au plus près demande de s’adapter à chaque instant. On ne contraint pas un animal, on s’adapte. J’ai l’habitude de dire qu’on filme un animal comme on filme un enfant : en prenant le temps d’entrer dans sa zone de confiance, il arrive à nous oublier, oublier les caméras, les 40 personnes qui l’entourent pour vivre sa vie le plus naturellement possible.

J’aime improviser avec les comédiens. À partir du moment où je les ai choisis, je les laisse s’emparer de l’esprit du film. Il en va de même pour les animaux. Je les laisse vivre leur vie. À moi de m’adapter à eux.

 

Vous opposez « chat des villes » et « chat des forêts » et vous resituez avec attention le chat dans son habitat « naturel et sauvage ». Vous ne cachez pas les réalités comme euthanasier l’animal pour éviter qu’il ne souffre, accepter qu’il se débrouille seul. Est-ce un message envoyé à la future génération sur la manière d’appréhender et de traiter les animaux ? 

Aimer, c’est respecter l’autre. C’est parfois devoir mettre ses désirs propres de côté pour respecter ceux de l’être aimé. Que celui-ci soit un humain, un chat ou tout autre être vivant. Ma façon de filmer est également très importante. J’aime filmer les détails. Prendre le temps d’observer l’autre permet une meilleure lecture de ses émotions, et donc une meilleure compréhension.

 

Quel écho trouvez-vous avec l’histoire du divorce des parents ? Est-ce la difficulté de chacun à grandir, y compris les parents qui préfèrent l’esquive et le mensonge à la vérité ?

Un ami vétérinaire m’a confié qu’il conseillait souvent aux parents en procédure de divorce de confier un animal de compagnie à leurs enfants.  Il ne s’agit surtout pas de voir l’animal comme un médicament mais plus comme un confident, une oreille, une écoute, pour l’enfant.

 

Vous-même, êtes-vous plutôt chien ou chat ? Rambo ou Rrou ?

Les deux mon Colonel… pour faire écho au film.

Honnêtement, j’étais plutôt chien avant de commencer le tournage. J’aimais ce côté proche de l’homme, contrairement au chat. Mais je me suis très vite rendu compte que l’espèce importait peu. Il s’agit de l’individu. On ne peut pas dire qu’on aime plus les chats ou plus les chiens. Chaque individu est différent. J’ai désormais un chat et il n’a rien de solitaire. Au contraire, il est très “pot de colle”…

 

La musique a une place prépondérante dans ce film. Comment avez-vous fait pour choisir le compositeur et quelles directives lui aviez-vous données ?

Pour moi, la musique est une forme de narration primordiale : si on ne peut faire passer les messages par l’image, c’est à la musique de prendre le relais, de porter les émotions.

Je travaille avec Julien Jaouen depuis mes débuts. Nous avons fait près d’une dizaine de films ensemble. Bien avant le début du tournage, je lui demande de m’envoyer des thèmes sur la base du scénario et du storyboard. Pendant le tournage, j’écoute en boucle ces thèmes afin d’affiner mes demandes par la suite lorsque la musique sera posée à l’image.

Les directives ?  On me dit souvent à la lecture de mes scénarios que ce sont des films d’animation…Que tout va être impossible à filmer en réel. C’est l’ample défi de mes films. Et la musique y participe énormément.  Je suis un fan des Pixar ou Dreamworks. J’aime qu’il évolue dans ces univers, parfois drôles, parfois dramatiques. J’aime la précision des notes placées exactement à l’image, caractéristique des films d’animation.

Virginie Hours, reporter pour Color My Geneva – tous droits réservés

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