Culture

“Le nageur ” de Pierre Assouline

Ce récit biographique retrace de manière documentée l’histoire exceptionnelle de l’athlète Alfred Nakache, né à Constantine, déporté d’Auschwitz à Buchenwald, champion de natation participant aux jeux olympiques de Berlin en 1938 et de Londres en 1948.

Le récit…

Pierre Assouline rend un poignant hommage à Alfred Nakache surnommé Artem, nageur hors du commun (15 fois champion de France, double recordman du monde), à la personnalité humble et courageuse. L’écrivain-biographe réussit à nous emporter sur les traces fascinantes de cet homme au destin tragique. Le champion  a été hanté toute sa vie  par Jacques Cartonnet, un concurrent jaloux qui l’a dénoncé avec sa famille, comme juifs. Ce qui a eu pour conséquence son incarcération pendant seize mois et l’assassinat de sa femme Paule et de sa fille Annie (âgée de deux ans) à leur arrivée à Auschwitz. « Si je le revois, je le tue » est scandé tout au long de l’ouvrage, comme un pansement pour ne pas oublier.

Ainsi, l’auteur explore avec finesse la période de l’occupation, la résistance, les camps de concentration et la place du sport à cette époque. Il excelle à narrer les tumultes indicibles, affreux de l’Histoire, tout en racontant le destin d’un homme courageux poussé par la volonté de l’excellence et le dépassement de soi.

Ce récit est une véritable leçon de vie portée par des réflexions humanistes nécessaires qui retentissent malheureusement encore aujourd’hui.

L’auteur…

Romancier, biographe, Journaliste, Pierre Assouline est membre de l’Académie Goncourt et Président du Festival du LÀC en Suisse. il est l’auteur d’une trentaine de livres, notamment dix biographies et autant de romans ainsi que des enquêtes et des documents. II produit des séries sur France- Culture et dirige le blog ” La République des livres”.

Pierre Assouline sera présent à  la librairie Payot Rive Gauche le 6 juin 2023 de 12h30 à 14h.

Un extrait…

« S’entraîner encore et encore. Au fond, on dirait qu’il a nagé toute sa vie sous l’inspiration de Bach quand celui-ci disait : « Quiconque travaillera autant que moi fera aussi bien. » Avant-guerre, sa réputation le précédait ; désormais, c’est sa légende. Au champion succède le héros. Il vit le moment où, à défaut de nouveaux records, un grand  sportif n’est plus connu que pour sa notoriété. Son passé devient une affiche. Puis on s’enflamme à nouveau pour lui, on veut y croire autant que lui, même si la nouvelle génération de nageurs, au premier rang de laquelle Vallerey et Jany, piaffe de détrôner son héros. On le voit hanter les bassins à nouveau, à Toulouse bien sûr mais aussi, lorsqu’il est à Paris, à la piscine du Racing à la Croix-Catelan. « La forme revient peu à peu », concède-t-il à ceux qui l’interrogent. Artem est de retour ! La comparaison avec le phénix fait florès dans les journaux. Nul n’a l’indélicatesse d’écrire que, tel l’oiseau de feu, il renaît de ses cendres… Alfred note certes des signes d’épuisement qui ne se manifestaient pas avant, sans qu’il soit jamais nécessaire de préciser avant quoi. Chacun comprend. Il a reconquis sa musculature et sa puissance. Sa volonté retrouvée l’autorise à penser aux miracles que seraient de nouveaux records. Mais rien n’indique que la machine du coeur suivra ».

Le nageur de Pierre Assouline, Gallimard

 

Sandrine Bourgeois, chroniqueuse pour Color my Geneva (tous droits réservés).

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